dimanche 12 octobre 2008

Eclatante autarcie

On a découvert en Afrique du Sud, un micro-organisme qui se nourrit uniquement des minéraux qu’il trouve autour de lui. Pour être précis, il s’agit de la bactérie Desulforudis audaxviator, qui vit à 3 kilomètres sous terre dans une mine d’or, donc sans accès au soleil, sans oxygène, dans une eau vieille de millions d’années chauffée à 60 °C. Pour mémoire, une eau à cette température provoque des brûlures presque instantanées chez l’humain.

Cette bactérie est un ovni, dans la mesure où elle vit absolument seule. C’est donc le seul exemple connu d’un biotope comportant une seule espèce.

Là où c’est renversant, c’est qu’aujourd’hui, l’environnement est de plus en plus appréhendé comme un système, ce qui implique qu’on s’intéresse de plus en plus aux relations entre les espèces d’un biotope et avec leur environnement inanimé (substances chimiques alentour, climat…).

Or là, macache, Audaxviator est un autiste souterrain. Pas de copines bactéries à longs cils, pas de cellules mortes à mâchouiller, pas de micro-caca à recycler, pas de méchant acarien dentu pour le dévorer, que de l’inerte ! C’est déjà un scoop en soi.

Mais qu’est-ce que ça signifie d’autre ? Ça signifie concrètement que s’il lui prenait de partir dans l’espace, Audaxviator n’aurait pas besoin de dérober un minibus pressurisé à la NASA pour tous ses copains. Comme l’atteste l’expérience des Bidochon, quand on voyage tout seul c’est quand même plus souple.

Donc si Audaxviator était capable de voyager dans l’espace, il pourrait peut-être coloniser d’autres corps célestes. Or on sait justement que certaines bactéries voyagent dans l’espace. Et il se trouve qu’Audaxviator est capable, quand le temps se gâte, de protéger son ADN et son ARN dans des endospores, le Tupperware® des bactéries. Pour couronner le tout, l’ADN d’Audaxviator lui confère une grande capacité d’adaptation.

Bref, une fois qu’on sait que les découvreurs d’Audaxviator, sacrés farceurs ces biologistes, l’ont baptisée en référence à Jules Verne, qui apostrophe en latin un « audacieux voyageur », on n’a plus qu’à conclure que notre ami souterrain pourrait bien passer du fond de la mine aux étendues célestes. Germinal sur Saturne, ça déchire. Il suffirait d’une petite collision avec un astéroïde qui viendrait décrocher justement la mine où Audax a élu domicile. Ça n’est pas tout à fait exclu à l’échelle temporelle de l’évolution des espèces.




Plus d’infos, en anglais :
http://www.sciencedaily.com/releases/2008/10/081009143708.htm

Sur le tardigrade, la magnifique planche du 16 septembre de Marion Montaigne :
http://tumourrasmoinsbete.blogspot.com/2008/09/mardi-tardigradophilie.html

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