vendredi 3 octobre 2008

La beauté des paysages

Pour commencer ce blog, un sujet qui me travaille depuis longtemps : qu’est-ce qui fait qu’un paysage est beau ? Pourquoi des paysages aussi variés que l’Aubrac ou le cirque de Mafate à la Réunion donnent une impression de beau ?

Alors, le beau, c’est un vaste débat philosophique, dans lequel je n’entre pas, ça serait trop long. Le point essentiel à en retenir à mon avis (mais vos commentaires m’intéressent sur cette question), c’est que le beau est issu d’un jugement personnel. Autrement dit, la subjectivité y joue un rôle important.

Quels ingrédients pour un beau paysage ?

Concernant le paysage en particulier, un élément essentiel est l’espace, notamment le ciel. Par exemple la première beauté de la mer, c’est l’espace. Cela dit, l’espace tient plus à la notion de paysage qu’à celle de beauté. Un sous-bois peut-être magnifique mais il est difficile de qualifier de paysage un endroit où la vue ne porte pas à plus de 30 mètres.

Il y a d’autres éléments intéressants mais plus ambigus : le côté sauvage. C’est ambigu parce qu’aujourd’hui, il n’y a presque plus de paysages vraiment vierges, à part certains déserts, certaines forêts mais ce ne sont pas des paysages qu’on fréquente souvent. Et le cratère du Teide à Tenerife comme le bocage du Morvan sont beaux, alors que l’un est presque dénué de toute intervention humaine, tandis que l’autre a été très modelé par l’homme (je laisse de côté pour cette fois-ci la notion de paysage urbain). Cependant, on trouve généralement le Teide plus beau parce que plus « fort ».

Mais que recouvre cet adjectif imparfait ? une impression de grandeur qui nous ramène à une dimension modeste mais aussi l’âpreté du paysage, presque nu de toute végétation, et le relief accidenté.

Inversement, j’ai entendu une Normande dire qu’elle n’aimait pas les paysages de Normandie parce qu’ils sont « mous ». Sans partager ce jugement, je le comprends : les reliefs sont doux, l’espace est homogène.

Cette notion semble importante mais pas non plus discriminante. Sont beaux un paysage du marais de Brière, très homogène, tout comme les falaises de Belle-Ile-en-mer, qui composent un paysage plutôt haché. Il s’agit alors de beautés différentes, qui éveillent chez le spectateur des sentiments différents : calme un peu ascétique en Brière, grandeur violente à Belle-Ile-en-mer.

« Voir » ou « vivre » un paysage ?

Un autre point sur lequel il importe de s’arrêter : les sens. Un paysage ne se réduit pas à la vue. Sinon une photo panoramique donnerait la même impression. Un paysage se vit avec tous les sens. Il faut y être. A mon sens, il faut même y marcher plusieurs heures mais là c’est pleinement subjectif. Le vent notamment peut jouer un grand rôle. La pluie aussi à sa manière.
Donc le paysage ne touche pas que nos yeux mais aussi notre peau, via le vent et la température, notre nez, nos oreilles. Donc, plutôt que de dire « admirer un paysage », on devrait dire « vivre une scène de nature ». Ça sonne un peu bizarrement mais ça paraît plus proche de la réalité, même si on reste les fesses posées.

On touche là à un autre point important : la sensation de se fondre dans le paysage, ou, soyons fous, le physiotope (un « lieu de nature »). Cette sensation est importante pour le randonneur mais est-elle indispensable pour trouver qu’un paysage est beau ? non car la plupart des panoramas sont admirés à partir de belvédères. Je laisse donc cette idée de côté pour le moment.

Autres ingrédients

Les couleurs, la végétation sont aussi des facteurs importants mais pas discriminants : des paysages comportant toutes sortes de couleurs et de végétation peuvent être beaux.
Un facteur vraiment discriminant, en revanche, est celui de la lumière. Le même paysage peut paraître un peu plat, voire terne, sous une lumière blanche d’été et enchanteur sous une lumière rasante d’hiver ou du matin.

Et donc…

Que conclure de tout ça ? Les éléments suivants, qui caractérisent pourtant un paysage, ne semblent pas discriminants quant à sa beauté : couleurs, végétation, relief, homogénéité, caractère sauvage. Seule la lumière joue un rôle discriminant dans l’impression de beauté.
Un autre point discriminant est l’harmonie. Alors là on tombe sur un os : l’harmonie semble à première vue aussi difficile à définir que la beauté. L’harmonie peut être homogène ou hétérogène, calme ou violente. Mais au fond, l’harmonie semble être un équilibre entre les composantes du paysage. La montagne peut écraser visuellement la plage, si la mer l’équilibre. Or il y a mille équilibres possibles, comme on le voit dans la nature.

Donc voilà la conclusion temporaire que je tire : dans l’hypothèse que tout paysage est un grand espace, ce qui fait la beauté d’un paysage, c’est son équilibre et la lumière qui le baigne. La beauté d’un paysage est donc quelque chose de fugace car la lumière bouge sans cesse. Cette beauté relève donc du temps aussi bien que de l’espace.

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