mardi 12 mai 2009

Etoile filante

Juste au seuil de la nuit, au cœur de Bab el-Oued,
S’agglutine un attroupement.
Il semble que décidément
Les bédouins du secteur goûtent les intermèdes.

C’est la célèbre idole du Sahara blanc,
Yasmina la Splendeur, dont les chameliers rêvent
Sous la tente en laine la nuit ;
Elle cambre son bassin lent
Dans les yeux sous les chèches quand le jour se lève,
Chacun en est encore empli.

Curieux, je me rapproche afin d’apercevoir
Cette étoile tombée, cette célébrité
Dont les courbes onctueuses font faner l’été
Incendiaire et renvoient les dunes dans le noir.

Elle danse un roulis chavirant et lascif
Ses hanches larges tanguent au rythme des cœurs
Et on lit sur la face des hommes songeurs
Un élan comprimé, un frisson convulsif.

Je recherche ses yeux camouflés par un voile,
Il me semble y trouver quelque trait familier
Sans pouvoir cependant cette impression délier
Mais une résonance a frémi dans ma moelle.

Et soudain sous la voûte rasée de mon crâne
Le souvenir revient éclatant en bouquet,
Feu d’artifice ancien, remugle de muguet
De ces mois pathétiques où je fus un âne :

C’est Lucette la Drue ! qui charriait son néant,
Ses passes à cinq sacs sur les avenues longues
Des contours de Paris, ses mamelles oblongues
Ses yeux bruns en amande et son vaste séant !

C’était alors la star des nuits des Maréchaux
Du spray sur sa crinière, du strass sur son derrière,
Un spécimen hâbleur, les deux jambons à l’air,
Qui quand il faisait froid avait toujours trop chaud.

D’abord je fus client, puis je devins ami
Puis je fus transpercé d’un seul coup – patatrac !
D’amour ! et du surin du mac.
Pour un peu j’y laissais la vie.
Cela me fit passer l’envie
De l’arracher de son tarmac.




Balises : spray, star, oued, spécimen (des explications ici)

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