lundi 5 janvier 2009

La nature est-elle sacrée ? (2)

Après des vacances bien méritées, je reprends la fin de mon billet du 20 décembre. La conclusion en était que nous humains avons le droit de modifier notre environnement uniquement dans la mesure où ça nous permet de vivre correctement et où aucune modification n’est irréversible.

J’écrivais que « vivre correctement » suppose de se fixer des limites plus sévères que celles que la biosphère nous impose pour notre survie ; cela suppose de faire preuve d’une certaine mesure, autrement dit, de ne pas modifier notre environnement à la légère.

Parlons concret

Essayons maintenant de rendre ce discours un peu plus opérationnel. Tout d’abord, il faut tenir compte de la situation de tous les humains, donc ne pas se limiter aux pays riches. Ça amène à se pencher sur ce qui est nécessaire à une existence correcte, donc, a contrario, ce qui ne l’est pas.

Il existe de nombreuses réflexions sur la nature des besoins fondamentaux de l’humain. Je m’en tiens ici à dire qu’il faut satisfaire les besoins physiques de base et, l’humain étant un animal social, traiter les conditions indispensables au bon fonctionnement d’une société (justice, police, éducation, transports, redistribution des richesses).

Une fois que cet ensemble est dessiné, même avec des contours flous, que reste-t-il ? Tout le superflu. La difficulté est que cette notion évolue selon les circonstances. Aujourd'hui, personne dans nos pays riches n’imagine se passer de l’eau courante et du frigo. Ils ne sont pourtant pas indispensables à la survie, comme le démontrent nos milliards de semblables dans les pays pauvres.

En revanche, pour reprendre le début de ce billet, sont-ils indispensables à une vie correcte ? Les citoyens des pays riches répondront sans hésiter que oui mais il faudrait interroger ceux des pays pauvres. On peut imaginer qu’ils répondront aussi par l’affirmative. Des biens/services comme ceux-là améliorent sensiblement le quotidien.

Contre l'hubris, la mise en balance

On met là le doigt sur un critère déterminant quant à l’acceptabilité environnementale d’un nouveau produit : le degré d’utilité pour les utilisateurs. A mon sens, le critère pourrait être formulé comme suit : amélioration substantielle des conditions de vie. En deçà d’une telle amélioration, on est dans le royaume du gadget et il y a mille autres manières de s’amuser ou même de se la péter que de s’équiper du dernier modèle de voiture ou de portable.

Cependant, ce critère doit être mis en balance avec la dégradation que l’usage du produit induit pour l’environnement.

Deux objections :
- L’amélioration substantielle des conditions de vie est impossible à évaluer sérieusement. Dans certains cas, elle est manifeste. Dans d’autres, son absence est manifeste. Dans d’autres encore, ça n’est pas clair. Que faire alors ?
- Il est très difficile de prévoir les conséquences de l’usage d’un produit sur l’environnement.


Aveu d'impuissance

Après des heures de réflexion, je m’avoue vaincu et accepte l’impossibilité d’établir une ligne de conduite générale a priori. Il faut donc s’en tenir à une approche pragmatique, où on met en balance les avantages que l’humanité retire d’une innovation et les modifications que cette innovation induit sur l’environnement. Cela implique de surveiller l’environnement sous tous ses aspects et d’accepter d’aménager les innovations, notamment dans la manière dont leur prix est fixé.


Diverticule

Pour élargir la réflexion au troisième pilier du développement durable, il faut aussi examiner ce qui pourrait être fait ailleurs avec les mêmes ressources. Un exemple : il est plus utile pour l’humanité de faire de la recherche médicale sur le paludisme, première maladie mortelle du monde, que sur les maladies rares. C’est un raisonnement glacial mais favorable à l’intérêt général.

Reste une difficulté mineure à surmonter : dans le système actuel, ça n’est pas l’intérêt général qui prime dans les choix des acteurs économiques mais le profit.

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